Gaze Letter N°57: Samah Karaki
Ceci est un aperçu de la Gaze Letter, la newsletter culturelle de Gaze Magazine. Pour la recevoir un jeudi sur deux en entier, inscrivez-vous !
This is a preview of the Gaze Letter, the cultural newsletter of Gaze Magazine. To receive it every other Thursday in its entirety, subscribe!
Cher·e vous,
Il y a un sentiment redoutable que nous partageons tous·tes face à l'injustice : l'impression d'être seul·e au monde. Cependant, malgré l'indifférence générale alors que le Liban est en proie à un projet colonial, la neuroscientifique libanaise Samah Karaki ne réclame pas l'empathie des autres. "Ça ne m’intéresse plus, et je ne veux pas que l'on se projette dans mon expérience. Il faut parfois s’oublier pour se consacrer aux faits", me confie l'autrice de L'Empathie est politique, qui en a assez que celle-ci ne s'applique qu'aux victimes parfaites. Il y a urgence, à comprendre et à agir contre les génocides auxquels nous assistons depuis trop longtemps. "Et ta famille, ça va ?" chuchote-t-elle finalement. Ça ira, quand demander cela ne sera plus une question de vie ou de mise à mort. — Mélissa Chidiac
Dear you,
When faced with injustice, we all share the same dreaded feeling of being alone in the world. However, despite the general indifference to Lebanon seemingly being in the grip of a modern-day colonial project, Lebanese neuroscientist Samah Karaki is not clamouring for empathy from others. ‘I'm not interested in that any more, and I don't want anyone to project themselves onto my experience. Sometimes you have to forget yourself in order to focus on the facts’, says the author of L'Empathie est politique, who is fed up with the fact that empathy only seems to apply to perfect victims. There is an urgent need to understand and act against the genocides we have been witnessing for too long. ‘How's your family doing?’ she finally whispers. I'll be fine, when this question is no longer a matter of life or death. — Mélissa Chidiac
"JEANNE DIELMAN", CHANTAL ACKERMAN (1976)
Considéré comme l’un des plus beaux films du 20ème siècle, je l'ai regardé il n'y a pas très longtemps, alors que j'étais déjà mère. Il est splendide, par sa lenteur, sa représentation de la routine par la répétition des gestes. C'est un film humble dans son féminisme, il ne fait que mettre en scène la performance de mère. Mais c'est assez pour en sortir avec un sentiment de révolte. Heureusement, on voit Jeanne sortir de cette routine, l'exploser.
Considered one of the most beautiful films of the 20th century, I watched it not long ago, when I was already a mother. It's splendid in its slowness, its depiction of routine through the repetition of certain acts. It's a film that's humble in its feminism; it simply stages the performance of a mother. But that's enough to make you feel rebellious. Fortunately, we see Jeanne break out of this routine, and watch as it comes crashing down.
"THE FEMINIST KILLJOY HANDBOOK", SARA AHMED (2023)
L'autrice critique l’injonction à la joie et au sourire. Elle traite de la nécessité de casser l'ambiance, de souler les institutions. Les institutions ont besoin du système, elles ne veulent pas être bousculées par des plaintes. D'ailleurs, elle documente ses nombreuses plaintes classées, la preuve qu'être pris·e au sérieux est un grand luxe.
The author criticises the injunction to be happy, to smile. She talks about the need to break the mood, to piss institutions off. Institutions need the system; they don't want to be upset by complaints. In fact, she documents the many complaints she has filed that have been dismissed, proving that being taken seriously is now a great luxury.
"AMAL HAYATI", OUM KOULTHOUM (1965)
C’est la force dans sa voix, et le personnage qu’elle est. Oum Koulthoum est la diva décisionnelle, celle qui assumait ses émotions. En grandissant au Liban, ma mère et mes tantes faisaient très souvent tourner ses disques. Quand elles l'écoutaient, elles changeaient de posture : le menton et les épaules soulevées.
It's the strength in her voice, and the character she is. Oum Koulthoum is the diva of decision, the one who owned her emotions. Growing up in Lebanon, my mother and my aunts would often play her records and when they listened to her, they changed their posture: chins and shoulders up.
Inscrivez-vous pour recevoir la Gaze Letter en entier, un jeudi sur deux.
Subscribe to receive the Gaze Letter in its entirety, every other Thursday.