Gaze Letter N°10 : Hélène Tchen

 

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Cher·e vous,

Qui a déjà assisté ou participé à un shooting photo pour un grand magazine pourra vous raconter une ribambelle d’anecdotes gênantes. Peu importe le magazine, si je puis dire sans m’attirer trop de foudres. C’est une question de culture professionnelle : les modèles ont intériorisé le fait qu’il était normal qu’elles soient traitées comme de jolis objets, les photographes qu’ils ou elles (plus souvent ils, dans mon expérience préalable à Gaze) peuvent imposer leur désir et dire des choses comme « séduis moi » à une femme qui pose pour eux, et le lexique même de la photo emprunte lourdement à celui de la chasse à courre. Shooter. Prendre. Capturer. Alors en commençant Gaze, on espérait ne jamais rejouer les dynamiques chasseresses qu’on avait vues à l’oeuvre. Notre première journée en studio était faite de premières fois. On dessinait les contours de notre direction artistique. C’était la première fois qu’on faisait ça dans le cadre de notre propre publication. C’est Hélène Tchen qui faisait les images, et la chorégraphe Ylva Falkqui posait pour elle. Et on a vu rapidement qu’une forme de magie opérait. Etait-ce dû à la non-mixité ? Je pense que oui (en espérant ne pas m’attirer trop de foudres, bis). Etait-ce dû au cadre safe qu’on avait réussi à créer ? Peut-être. A l’infinie douceur de cette photographe et à sa façon de faire des images de mode sans jamais reproduire les dynamiques de pouvoir qui y sont à l’oeuvre ? Sans aucun doute. C’est en tous cas un souvenir qui restera gravé.—Clarence Edgard-Rosa

Dear you,

Anyone who has ever attended or taken part in a photo shoot for a major magazine can tell you a host of embarrassing anecdotes. It doesn't matter which magazine, if I may say so without incurring too much wrath. It's a matter of professional culture: the models have internalised that it's normal for them to be treated as pretty objects, the photographers have internalised the fact that they can impose their desire and say things like "seduce me" to a woman posing for them, and the very lexicon of photography borrows heavily from that of hunting. To shoot. To take. To capture. So when we started Gaze, we hoped never to replay the hunting dynamics we'd seen in action. Our first studio photoshoot was a whole day of firsts. We were just drawing the outlines of our artistic direction. It was the first time we were doing this for our own publication. Hélène Tchen was taking the pictures, and the choreographer Ylva Falk was posing for her. And we quickly saw that a kind of magic was at work. Was this due to the fact that we were an all female team? I think so (hoping that I won't incur too much wrath, again). Was it due to the safe environment we had managed to create? Maybe. To the infinite gentleness of this photographer and her way of making fashion images without ever reproducing the power dynamics at work? Without a doubt. In any case, it is a memory that will remain engraved.—Clarence Edgard-Rosa


"THE HEART IS A LONELY HUNTER", Carson McCullers (1940)

Ce livre a été écrit par une autrice qui à l'époque avait 17 ans. Incroyable quand on voit la complexité des personnages et de la narration. J'ai beaucoup aimé découvrir les trajectoires de ces personnages s'entremêler sans se comprendre, dans une même quête du bonheur. J'ai dû le lire quand j'avais 22 ans, j'étais encore moi-même à la recherche de ce que je voulais dans cette vie. Une lecture très introspective.

This book was written by an author who was 17 years old at the time. Incredible when you consider the complexity of the characters and the narration. I really enjoyed discovering the trajectories of these characters intertwining without understanding each other, in the same quest for happiness. I must have read it when I was 22, I was still searching for what I wanted in this life. A very introspective read.


"A GIRL WALKS HOME ALONE AT NIGHT", Ana Lily Amirpour (2014)

C'est un des films modernes qui m'a le plus marquée. Je commençais à beaucoup m'intéresser au féminisme à cette époque et il m'a permis de me questionner sur ma condition de femme puis ma construction féministe. Me dire que c'était une femme iranienne qui avait réalisé ce film était d'autant plus fort. J'avoue par la suite avoir fantasmé marcher seule dans la rue sans avoir peur de me faire agresser. 

It's one of the modern films that struck me the most. I was starting to take a great interest in feminism at that time and this film helped me to question my condition as a woman and then my feminist construction. Knowing that it was an Iranian woman who had directed this film made its impact all the stronger. I admit I later dreamt about walking alone in the street without being afraid of being assaulted.


"SEVEN WORDS", Weyes Blood (2016)

Natalie Mering, aka Weyes Blood, est une de ces musiciennes qui me permet de me centrer sur mes émotions mais aussi de réfléchir au-delà de moi même. Je ne me lasserai jamais d'écouter sa voix mélancolique et ses textes d'une profonde humanité. J'interprète Seven Words comme une chanson d'amour pour soi. Mon point de vue par rapport à cette chanson évolue avec moi et je me prends à regarder la jeune Hélène de 18 ans avec plus de compassion. 

Natalie Mering, aka Weyes Blood, is one of those musicians who allows me to focus on my emotions but also to reflect beyond myself. I will never tire of listening to her melancholic voice and the profound humanity of her lyrics. I interpret Seven Words as a love song for the self. My perspective on this song evolves with me and I find myself looking at the 18-year-old Hélène with more compassion.

 

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Clarence Edgard-Rosa